Ce 28 mai 2024, dans le Projet de loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture (PLOSARGA) que l’Assemblée nationale a adopté, le Gouvernement a ajouté de nouveaux objectifs pour la filière légumineuses. Alors que le plan France Relance de 2020 sur la stratégie nationale en faveur des protéines végétales prévoyait déjà d’atteindre 8 % de surfaces en cultures de légumineuses en 2030 (contre 4 % en 2020)[1] , le PLOSARGA relève l’objectif à 10 %.

Comme pour l’agriculture biologique, le Gouvernement reste encore une fois sur des objectifs uniquement surfaciques, et fait abstraction d’objectifs de viabilité économique des exploitations.
De plus, l’amendement du Gouvernement n’est pas non plus clair sur ses objectifs : parle-t-on de 10 % de surfaces de cultures de légumineuses (récoltées ou non) ou bien 10 % de cultures légumineuses commercialisables ? S’agit-il de 10 % de légumineuses biologiques ou bien de 10 % de légumineuses cultivées toutes pratiques confondues ?

En 2020, les surfaces en légumineuses à graines (soja, pois chiches, lentilles, haricots secs) et en légumineuses fourragères (luzerne, trèfle, sainfoin, etc.) s’élevaient à 1 Mha[1]. Quant aux surfaces en céréales d’hiver, elles oscillent autour de 6,6 Mha depuis 2019 et sont globalement en baisse[2]. Passer à 10 % de surfaces en légumineuses en 2030 signifierait diminuer de 1.5 Mha celles en céréales. France Grandes Cultures (FGC) ne peut que se réjouir de la volonté de rééquilibrer les surfaces en céréales et en protéagineux, mais s’interroge sur la contradiction qu’elle engendre par rapport à la vocation exportatrice de la France (basée notamment sur les céréales).

FGC ne conteste pas la volonté du gouvernement de vouloir atteindre l’objectif d’autonomie protéique (que FGC entend au niveau européen). Cependant, les agriculteurs français ne sont pas compétitifs sur les légumineuses et plus globalement sur les oléoprotéagineux face aux puissances extra-européennes (Brésil pour le soja avec 2 récoltes par an, Australie pour le colza et Ukraine pour le tournesol). Les coûts de production en France sont encore trop importants en comparaison des cours des marchés mondiaux : 300 €/t pour du pois n’est pas suffisant pour couvrir ses coûts de production et motiver l’agriculteur à en cultiver.

Déjà en 1962, l’accord du Dillon round au GATT était préjudiciable au développement de ces productions, qui en parallèle à la modification du comportement alimentaire des européens en faveur des viandes blanches par rapport aux viandes rouges, auraient dû prospérer. La dépendance européenne aux importations de soja résulte de ces accords commerciaux qui ont créé une asymétrie dans la protection douanière entre les céréales et les oléoprotéagineux. Le soja importé à bas prix a été également préjudiciable aux légumineuses fourragères (notamment la luzerne).
Il est donc impossible de réussir un plan protéines sans protéger notre marché européen, soit en renégociant les accords commerciaux défavorables signés par la Commission européenne, soit en refusant toutes marchandises qui ne correspondent pas à notre modèle de production ou à nos attentes sociétales.

Les propositions de FGC
Pour faciliter la culture des oléoprotéagineux, FGC demande à ce que des taxes douanières soient remises en place sur les importations d’oléoprotéagineux venues des pays extra européens, pays qui ne respectent que peu nos normes.

Suite à l’instauration de ces taxes, la France, et à plus grande échelle l’Union européenne, serait en mesure de garantir un prix minimum rémunérateurs d’achat des oléoprotéagineux aux producteurs. Le président Emmanuel Macron, lors du Salon international de l’agriculture, a d’ailleurs annoncé sa volonté de garantir des prix planchers. Pour FGC, il s’agit de créer des conditions favorables pour que les agriculteurs se retrouvent économiquement dans la production d’oléoprotéagineux, que les filières se construisent (collecte, triage, etc.) et pour que les industriels préfèrent l’achat d’oléoprotéagineux français (à la place de ceux importés).

Enfin, FGC milite pour que les agriculteurs aient moins de contraintes techniques dans la conduite des cultures d’oléoprotéagineux et tout particulièrement des légumineuses. Alors que les pays tiers n’ont que peu de normes et que les producteurs français et européens sont en concurrence directe avec, il faut laisser la possibilité aux agriculteurs de pouvoir traiter les cultures de légumineuses, et ne pas considérer cette culture comme n’ayant qu’un intérêt de surface écologique. Les légumineuses ont un intérêt agronomique dans les rotations. Pour FGC, il est aussi indispensable d’amplifier la recherche pour trouver des variétés adaptées aux conditions climatiques actuelles et futures.

 

Sources :

[1] https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/fs-2024-rapport-france_relance_vol_2_10_proteines_vegetales_1.pdf

[2] https://agreste.agriculture.gouv.fr/agreste-web/download/publication/publie/IraGcu2414/2024_14inforapgdescultures.pdf

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