La section viticole de la Coordination Rurale a participé aux Premières estivales de Piwi France, une journée d’échanges et de mini-conférences dédiée aux cépages résistants. Cette thématique est de plus en plus présente dans l’actualité et soulève encore de nombreuses interrogations.

Qu’est-ce que Piwi France ?

L’association PIWI France, créée en 2016, a tout comme sa grande sœur PIWI International, pour action principale de promouvoir les cépages résistants aux maladies cryptogamiques de la vigne. Initiée dans le but notamment de faciliter les échanges de connaissances scientifiques, pratiques et juridiques entre les différents acteurs de la filière, l’association a pour mission de représenter et défendre les intérêts des vignerons français planteurs de cépages résistants. Dans l’idée d’encourager l’engagement vers une viticulture plus durable et la conception de nouveaux cépages résistants adaptés aux différents terroirs français, l’objectif de l’association est également d’inciter à la recherche fondamentale et appliquée sur le sujet. Véritable base d’observations des cépages résistants, l’association organise également des colloques annuels et des formations sur ce thème.

Quels sont les cépages résistants aujourd’hui utilisés en France ?

  • Muscaris (blanc) : dans le Languedoc, ce cépage laisse observer de bons rendements mais n’est pas adapté à la taille mécanique et possède des feuilles épaisses (inadaptées au Languedoc).
  • Souvignier gris (blanc) : peu de défauts recensés. Un très bon rendement mais largement perfectible d’un point de vue qualitatif.
  • Cal 6-4 (blanc) : aromatique et qualitatif, ce cépage semble être l’un des plus intéressants malgré un niveau de production moyen et un nom compliqué en matière de communication. Même son de cloche en Gironde, où le résultat vinifié est très intéressant.
  • Monarch et Prior (rouge) : ces cépages présentent une bonne résistance et une bonne qualité après vinification.
  • Cabernet Carbon (rouge) : les derniers résultats font état d’une perte d’étamines. Le cépage devient femelle et perd tout intérêt.
  • Cabernet jura (rouge) : il s’agit d’un des cépages les plus proches de Vitis vinifera en matière de qualité du vin. Il est davantage adapté pour une taille en Guyot ou Cordon de royat. En Gironde, ce cépage est très fructifère et fait état d’un très bon port mais laisse apparaître quelques problèmes d’érinose au bout de la 2ème année.

Pour la grande majorité, les viticulteurs effectuent un à deux traitements préventifs afin de limiter un contournement de la résistance. Pour certains, les résultats sont probants et ne semblent pas indiquer de contournement et ce depuis 9 ans.

Sont-ils vraiment efficaces face aux différentes maladies (mildiou, oïdium, Esca, black rot, etc.) ?

Les premiers résultats observés sur les cépages résistants en Languedoc font état de résultats assez hétérogènes selon les maladies :

  • Oïdium : les cépages résistent très bien à l’oïdium qu’ils soient issus des travaux de Bouquet ou du programme ResDur.
  • Mildiou : les cépages portant uniquement le gène de résistance Rpv3 posent régulièrement problème. Le contournement de la résistance sur ce gène semble être avéré.
  • Black rot : les lignées issues de travaux de Bouquet y sont beaucoup plus sensibles, même sur des zones de faible pression.
  • Pourriture : les retours d’expérience font état d’un niveau de résistance très élevé, et d’une faible sensibilité dans le Languedoc.
  • Esca : maladie beaucoup plus complexe et aucun résultat probant n’est connu.
Les travaux d’Alain Bouquet et ceux du programme ResDur

Les cépages résistants élaborés par Alain Bouquet s’appuient sur une espèce source : Muscadinia rotundifolia. Cette espèce américaine a été sélectionnée pour de nombreuses raisons mais surtout pour sa résistance avérée au mildiou et à l’oïdium. Les travaux d’A. Bouquet ont donc consisté à transférer cette résistance à la vigne via de multiples (jusqu’à 5 pour génération RV6) rétrocroisements successifs entre ces variétés hybrides et des cépages connus comme le merlot, le grenache ou le cabernet-sauvignon. Les cépages résistants les plus évolués ont un génotype quasi identique à celui de Vitis vinifera (de 95 à 99.8 %). Les travaux d’Alain Bouquet ont ainsi permis une introgression des gènes de résistance Run1 (oïdium) et Rpv1 (mildiou) à partir de l’espèce sauvage Muscadinia rotundifolia. Le programme national « Résistance Durable (ResDur) » a été lancé par l’Inra Colmar en 2000 et reprend la 5ème génération de Bouquet avec des hybrides franco-américains. Les objectifs majeurs sont la durabilité de la résistance, l’adaptation aux contraintes climatiques et l’adéquation avec les exigences de qualité de la filière vinicole - vin correspondant à l’attente des consommateurs et produisant un revenu suffisant au vigneron.

Où en est la recherche aujourd’hui et quels sont ses objectifs ?

Actuellement, la recherche sur les cépages résistants se fait à différents niveaux : par les viticulteurs, par des obtenteurs privés, par des établissements de recherche et des interprofessions. A l’Inra, le contexte actuel de recherche concernant la viticulture est le suivant :
  • Développement d’une gamme de purs jus de raisin > Création filière « jus de raisin » (FIJUS-R@isol)
  • Vins de qualité à teneur réduite en alcool (VDQA) Partenariat avec l’Agence Nationale de Recherche (2006-09), Région Languedoc-Roussillon (2007-13) et CIVB (2015-18)
  • Projet Vitiviniculture durable Objectif : Protection du vignoble et qualité des vins avec des génotypes tolérants et le développement de nouveaux systèmes de conduite. Ce projet contient le programme national ResDur : ResDur1 : 3 génotypes (0.5 Ha/chacun) Collection de ResDur2 « intermédiaires » : 200 génotypes (à raison de 4 individus par génotype) issus d’un projet cordonné par l’UMR SVQV (Santé de la Vigne et Qualité du Vin) de l’INRA Colmar
Premiers résultats sur une parcelle de cépages résistants, de Gamay et de Glera depuis 9 ans :
  • Pour l’instant les cépages issus des programmes HRV (Hybride Résistante Variété) et ResDur sont résistants à mildiou/oïdium. Mais pour quelle durabilité ?
  • Des symptômes de tétranyques et érinose apparaissent mais ne sont pas préjudiciables.
  • Quelques variétés ResDur et HRV sont sensibles au black rot et Phylloxera gallicole (en évaluation)
  • Qualité des vins : excellente sur HRV (99 % V vinifera)
  • Typicité : G5 est comparable au Muscat, 3159* au Chardonnay, 3160 au Cabernet franc et 3176* au Grenache.
Premier bilan d’après l’INRA :

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