Les grands piliers de la réforme européenne sont le verdissement (avec la mise en place de nouvelles contraintes environnementales qui viendront conditionner le versement d'une part importantes des aides), la convergence des aides (afin de gommer substantiellement les écarts entre les niveaux d'aides découplées par hectare), et plus globalement une redistribution des aides pour mieux soutenir des agriculteurs ou secteurs considérés prioritaires.

Dénuée de tout moyen de régulation, enfermée dans des contraintes budgétaires liées à une distribution d'aides aux effets pervers, cette future PAC, dans la lignée de la réforme de 1992, ne s'attache pas à résoudre les problèmes de fond auxquels notre agriculture fait face.

  • Verdissement : 30 % des aides directes sont soumises au respect de contraintes environnementales : c'est une conditionnalité renforcée !
  • maintien des prairies permanentes (PP) : A l'heure actuelle, il est prévu un suivi national avec une alerte régionale à définir. La demande de la CR (mutualisation pour éviter un suivi plus strict, par exemple au département ou à l'exploitation) est donc en bonne voie.
  • diversification de l'assolement : pas d'obligation si < 10 ha de surface arable et si la surface en herbe est prépondérante (avec des seuils).
  • surfaces d'intérêt écologique sur 5 % de la surface arable dès 2015 : elles correspondent globalement aux anciennes SET (qui devaient représenter 4 % de la SAU). Pas d'obligation si < 15 ha de surface arable et si la surface en herbe est prépondérante (avec des seuils).
  • Création d'aides couplées : à budget constant, des aides sont créées et sont donc financées par des prélèvements sur les aides directes.
  • Paiement redistributif : mise en place sur les 52 premiers ha d'une aide majorée annuelle, dont l'enveloppe représentera 20 % du budget des aides découplées en 2018 (au détriment du budget global des DPB).
  • Les DPU sont remplacés par des Droits à Paiement de Base (DBP), avec un montant fortement réduit (verdissement, prélèvements pour création d'aides couplées et pour le développement rural, « paiement redistributif » sur les 52 premiers ha, convergence).
  • Convergence à 70 % : les DPB convergeront chaque année pour être au moins égaux à 70 % de la moyenne nationale en 2019, MAIS les pertes calculée en 2019 seront limitées à 30 % maximum de la valeur initiale du DPB en 2015 ( option soutenue par la CR).

 

Aides couplées : si les céréaliers sont bien perdants, les éleveurs sont loin d'être tous gagnants !

Les fameuses aides couplées annoncées en grande pompe par le Président Hollande en octobre dernier au Sommet de l'élevage de Cournon ont fait l'objet de quelques mois de faux  débats qui se sont limitées à la répartition des misérables enveloppes qui y sont consacrées, à budget constant. La redistribution en faveur des éleveurs annoncée par le ministre n'a pas fini de décevoir : plancher, plafond, dégressivité, obligations diverses... ne permettront à personne d'en tirer un soutien effectif. Le lobbying de Coop de France a fonctionné et l'agriculteur devient apporteur de matière première contractuellement enchaîné, dont les prix seront fixés par les industries.

Les simulations d'ores et déjà réalisées par le ministère (par grande orientation des exploitations ou « OTEX »), illustrent concrètement ce que la CR avait prédit : tous perdants, ou presque ! Selon ces calculs, seuls les élevages bovins sur herbe gagneraient 9 à 10 % d'aides en 2019 par rapport à la situation actuelle et ceux d'ovins-caprins, 28 à 29 %. Quant aux élevages de bovins lait sur maïs, ils subiraient 23 % de perte, les polyculteurs éleveurs 13 % de perte et les élevages bovins lait herbe et mixte seraient globalement épargnés avec + 1 % sur leurs aides. La transparence des GAEC devrait s'appliquer. Ces estimations moyennes actuelles risquent fort de masquer une réalité encore plus désastreuse, le moment venu, avec les réductions globales de budget et autres disciplines financières....


Autres mesures : encore une fausse joie pour les éleveurs avec l'ICHN

Si on peut saluer la revalorisation annoncée de l'ICHN de 15 % en 2014 et l'accès à cette indemnité à la production laitière « laitiers purs » en ZDS et piémont non laitier, l'intégration en 2015 de la PHAE pose question. Son montant était jusqu'alors de 76 €/ha plafonné à 100 ha. Le « complément PHAE » intégré annoncé est de 70 €/ha, et ce qui a été présenté comme un relèvement du plafond est en fait une baisse pour les élevages plus importants, puisque ce complément (avec prise en compte de la transparence pour les GAEC) ne sera touché que sur... 75 ha au maximum ! Autrement dit : d'un potentiel d'aides de 7600 € pour 100 ha on passe à un potentiel de 5250 €. Encore des effets d'annonce au rendez-vous...

Un plan de compétitivité et de modernisation doté de 200 M€/an sera mis en place pour succéder au PMBE : faiblement doté, il sera surtout tourné vers l'agro-écologie et les grosses unités collectives de méthanisation.
Le soutien à l'installation est renforcé : en fait, il s'agit là encore d'une réorientation des aides  avec, en plus du second pilier (25 M€), une enveloppe de 1 % prélevée sur le premier pilier (75 M€).

Les crédits destinés aux MAE (mesures agroenvironnementales désormais cogérées par l'Etat et les Conseils régionaux) et à l'agriculture biologique sont doublés : c'est ici encore le contexte économique global qu'il faut d'abord sécuriser pour déclencher plus d'engouement de la part des agriculteurs, en particulier vers la production biologique.

Enfin, 85 M€ iront financer des mécanismes de prévention et de gestion des risques en agriculture. Hélas, cette PAC ne s'attaquant pas en premier lieu à stabiliser les marchés à travers une régulation des productions et une protection aux frontières adaptées, la gestion des crises ne peut être qu'un puits sans fond.

La CR se battra encore pour préserver au mieux la liberté d'entreprendre des agriculteurs. La FNSEA-JA-APCA veut en particulier restreindre la définition de l'agriculteur pour exclure des aides les retraités et pluriactifs. La CR est très attentive à cette question dans le cadre de la LAA.

Nous vous suggérons également la lecture du dossier PAC intitulé : 2015-2020 : une PAC efficace au service de tous

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