Dans un récent rapport, le ministère de l'Agriculture s'oppose à la FNSEA, Coop de France et l'UNCEIA qui veulent accroître les prérogatives des vétérinaires salariés aux dépens des vétérinaires libéraux. La Coordination Rurale félicite cet acte de résistance face à ces professionnels agricoles qui défendent des intérêts purement économiques. Le rapport (consulter le rapport) en dit long sur le lobbying déployé pour contrôler à terme toute la production agricole...

 

Indépendance et impartialité

Deux mots d'importance pour l'exercice de la médecine vétérinaire et qui sont incompatibles avec le modèle réclamé par la FNSEA et ses familles.

 

Les vétérinaires salariés d'un organisme non habilité ne peuvent pratiquer aujourd'hui que la médecine préventive dans le cadre des programmes sanitaires en élevage. Or les lobbyistes agricoles exigent en plus la possibilité d'exercer les actes vétérinaires. Cette demande de dérogation s'appliquerait aux coopératives, groupements de producteurs et organismes de reproduction et d'amélioration génétique.

 

En février 2014, la contribution de la CR au Code de déontologie vétérinaire pointait déjà un déséquilibre entre vétérinaires libéraux et salariés des coopératives. Leurs contraintes financières et leurs logiques commerciales sont différentes. Nous savons tous que les cadeaux d'une Coop se répercutent toujours quelque part... Pour la CR, il est primordial de conserver l'implantation des vétérinaires indépendants pour laisser le choix aux éleveurs !

 

Des arguments contestables pour une finalité pire encore

D'après la FNSEA, les nouvelles prérogatives des vétérinaires salariés auraient pour but de fournir un « service plus complet aux adhérents ». Or, le rapport dénonce l'obligation actuelle pour certains associés-coopérateurs d'utiliser les services des coopératives. Cela ne sera pas différent pour les actes de médecine vétérinaire. Autrement dit il s'agit là d'une stratégie visant à maîtriser un maillon en plus de la filière !

 

« Les déserts vétérinaires pourront être comblés ». Le rapport alerte sur la concurrence qui serait faite aux vétérinaires libéraux qui devraient alors se rabattre uniquement sur les animaux de compagnie pour être rentables. Le manque de services surviendrait alors pour les non-coopérateurs ! Un témoignage rapporté des entretiens au Ministère montre que certaines OPA veulent accélérer la désertification pour ensuite mieux la maîtriser. Ces objectifs dépassent les intérêts des éleveurs, et il est étonnant que la FNSEA les partage. Quand on sait que le nombre des vétérinaires augmentera de 33 % d'ici 2022, il y a sûrement moyen de développer autrement le service dans les campagnes.

 

Enfin, les coopératives proposent d'entrer au capital des sociétés vétérinaires, soi-disant afin d'impliquer plus les associés-coopérateurs dans les programmes préventifs et de permettre des investissements plus conséquents aux praticiens. Le contrôle par le capital semble être à la mode : c'est ce que la CR appelle l'intégration ! Le principe est simple, affaiblir pour mieux contrôler. Cependant, le système de prévention sanitaire est déjà efficace en l'état et les banques prêtent facilement aux vétérinaires en poste...


Ce sont donc autant d'arguments infondés pour justifier l'organisation d'un monopole autour de la médecine vétérinaire.

Réagir et rester vigilants

Pour la Coordination Rurale, l'enjeu des vétérinaires de campagne se situe au niveau de la formation. Aujourd'hui, 40 % des nouveaux praticiens en France obtiennent leur diplôme à l'étranger faute de places disponibles. Il conviendrait d'intégrer une spécialisation rurale aux concours d'entrée des écoles.

 

Il y a également des écarts de prix considérables sur les médicaments vétérinaires entre les pays de l'Union européenne. Pour des produits sensiblement identiques, les éleveurs français doivent pouvoir bénéficier d'une compétitivité équivalente à leurs voisins espagnols ou allemands. Grâce au cloisonnement du marché français les distributeurs de médicaments font des marges confortables sur le dos des éleveurs. C'est le combat de l'Association AUDACE soutenue par la CR depuis plusieurs années et qui est en voie d'être reconnu dans les instances européennes. (voir l'article)

 

Le rapport du Ministère montrant clairement les objectifs des Coopératives, il faut capitaliser sur cette expérience et rester vigilants. L'Ordre des vétérinaires doit avoir un droit de regard sur les pratiques des vétérinaires salariés d'organismes privés (contrats de travail, clauses d'intéressement notamment) et sur leurs relations avec les éleveurs, afin de veiller au plus grand respect de la déontologie en la matière. Cela apparaît d'autant plus indispensable que l'Ordre interviendra suite à la Loi d'Avenir Agricole, comme médiateur dans les conflits entre éleveurs et vétérinaires.

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