MARNE. Le jugement a été mis en délibéré dans le dossier dit des cotisations forcées, à Toulouse. Dans la Marne, les méthodes utilisées par la FNSEA ne diffèrent pas de celles en cause ici. Un système qu'il faudra bien réformer reconnaît d'ailleurs la fédération départementale.

Lire l'article complet paru dans le journal L'Union le 26 novembre 2012

C'est ce qu'il appelle un « système féodal ». Et pour Jacques Commère, qui représente l'Organisation des producteurs de blés pour la Coordination rurale, il est grand temps d'y introduire « de l'éthique, et au moins un brin de démocratie ». En cause, le recouvrement des cotisations syndicales de la FNSEA - via ses filiales spécialisées - par des organismes agricoles de stockage.

Le lièvre a été soulevé par la Confédération paysanne et la Coordination rurale et s'est soldé par un procès devant le tribunal correctionnel de Toulouse. A la barre : deux responsables de coopératives ainsi que trois structures spécialisées affiliées à la FNSEA : l'Association des producteurs de blé (AGPB), des producteurs de maïs (AGPM) ainsi que la Fédération des oléagineux et protéagineux (FOP).

Toulouse donc, où les méthodes ne diffèrent en rien de ce qui se pratique, par exemple, dans la Marne. Mêmes structures, mêmes méthodes, et mêmes constats sur les factures des agriculteurs.

« Les choses sont présentées de telle manière que de nombreux professionnels ne savent pas trop à quoi correspondent certains prélèvements, ou imaginent qu'ils sont obligatoires… », déplore Jean-Paul Simonnot, agriculteur à Montepreux. Car si les coopératives prélèvent spontanément des cotisations au seul profit du mastodonte FNSEA, certaines le font d'une manière un peu plus transparente que d'autres.

Où est le choix ?

Lorsque le cultivateur apporte son stock à l'organisme en effet, c'est celui-ci qui rédige la facture à son nom. Et au milieu des lignes de chiffres, se trouvent - notamment - deux sortes de prélèvements plus ou moins bien identifiés selon les cas. D'un côté, les Cotisations volontaires obligatoires (CVO), destinées à financer les interprofessions, et qui n'ont donc rien de facultatif. De l'autre, des cotisations syndicales à destinations de l'AGPB, de l'AGPM, de la FOP, ou autres, selon la spécialité en question.

« Quand on le voit sur la facture, il est déjà trop tard, remarque de son côté Claude Cellier, responsable marnais de la Confédération paysanne. Je parle ici d'une coopérative de betterave par exemple. Très peu de monde le sait, mais chaque année, il faut envoyer un courrier avant le 31 décembre si on ne veut pas être prélevé. »

Discrimination syndicale, méthode contestable, voilà ce que la CR et la CP reprochent à la FNSEA. Le procédé a en effet de quoi surprendre, bien qu'il soit en place depuis fort longtemps. On imagine mal, dans un autre contexte, un employeur retenir des sommes sur les fiches de paie de ses salariés au profit d'un syndicat, fut-il majoritaire.

« Pour eux, ça tombe sous le sens, l'argument est de dire que cela profite à tous, regrette encore Jacques Commère, qui représentait l'Organisation des producteurs de blé (CR) au procès de Toulouse. L'appartenance syndicale, ou politique, doit être le fruit d'un vrai choix. C'est une chose intolérable. »

Outre l'idée d'une condamnation, les parties civiles comptent surtout sur ce procès pour que tous les agriculteurs prennent conscience de ce qu'ils paient réellement.

Adhérents inconnus

« On ne peut pas dire que cela se passe à l'insu des agriculteurs, argumente de son côté Benoît Piètrement, président départemental de la FDSEA. Mais il est certain qu'il va falloir rebattre les cartes. Si les choses ne sont pas clairement expliquées, ou si certaines coopératives demandent un courrier signifiant le refus de l'agriculteur chaque année, ce n'est pas normal. »

La Fédération se serait sans doute bien passée de cette publicité à l'approche des élections dans les chambres d'agriculture.

Surtout, et Benoît Piètrement en est bien conscient, une adhésion laissée à la seule spontanéité des agriculteurs entraînera de facto une baisse naturelle des cotisations, et un surplus de travail. Toutefois, reconnaît-il, « et en dehors de ce procès, nous avons du travail à faire à ce sujet. L'un des inconvénients de prélever via les organismes stockeurs est que nous ne connaissons pas nos adhérents ».

Le procureur a requis des peines allant jusqu'à 100 000 euros d'amende à l'encontre des organisations mises en cause alors que l'affaire a été mise en délibéré au 28 janvier. Quoi qu'il en soit, conclut le responsable marnais, « un changement serait bénéfique. On traîne un système qui semblait naturel à l'époque, mais qui aujourd'hui, créé de la tension ».

Julienne GUIHARD-AUGENDRE

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